M. B est un chibani au visage quelque peu abîmé, ne parlant pas bien le français.
À peine assis, il sort ses documents : deux articles de journal, un jugement, et divers justificatifs de versement de pensions…
Que veut-il ?
Je finis par comprendre, en décryptant ce qu’il me dit et en lisant en diagonale les papiers devant moi, qu’en 1975, il a été blessé dans l’incendie d’une maison qu’il occupait avec d’autres compatriotes.
Il y a eu des procédures judiciaires et il a été indemnisé.
Aujourd’hui, il estime qu’il n’a pas touché assez et veut écrire… ben… au gouvernement pour réclamer plus.
Je lui explique que, telle que se présente l’affaire, je ne peux rien faire. Mais, peut-être pourrait-il consulter un conseiller juridique, ou encore l’association d’aide aux victimes ?
« J’y suis allé l’autre jour, j’ai vu les deux, ils m’ont dit qu’ils pouvaient rien faire.
- Si les spécialistes du droit ne peuvent rien faire, alors moi encore moins, monsieur. »
Je répète la même chose, j’essaie d’expliquer les notions de prescription et d’affaire jugée définitivement, mais il ne veut rien entendre.
« Personne veut m’aider parce que je suis Arabe et musulman. »
Oooh, ça, ça a le don de m’énerver !
Je lui rétorque qu’il serait Chinois ou Martien, les lois sont ce qu’elles sont et qu’elles ne changeront pas pour lui.
« Je dis pas que c’est toi qui penses ça.
- Ni moi, ni personne ! »
Et je le raccompagne vers la sortie.
Zut alors !