C’est presque la question que m’a posée M. K., réfugié irakien arrivé en France en cours d’année, avec son épouse, leurs deux enfants, et ses parents âgés. En fait, il m’a plutôt demandé si je parlais anglais car lui ne connaissait que cette langue, ou alors l’arabe…
Vu mon niveau en arabe, il vaut mieux essayer l’anglais !
Pour la première consultation, il s’agissait de remplir une demande de logement social. Il avait étalé de nombreux documents sur le bureau, je pouvais donc lui désigner ceux qu’il faudrait produire.
Usant de périphrases pour poser les questions, j’arrive à comprendre qu’il cherche un appartement assez grand pour toute sa famille, parents compris, et que sa mère, handicapée, a besoin d’installations particulières.
Ouf, le dossier est rempli ; je passe le relais aux employés du service logement de la mairie.
Quelques semaines plus tard, M. K. revient pour remplir un dossier de DALO (droit au logement opposable). Déjà, je n’aime pas trop cet exercice car je trouve que le document, certainement conçu à la va-vite, n’est pas clair. Mais là, pour le remplir, si je dois mener l’entretien en anglais !... C’est au-delà de mes compétences. Comment dit-on « dossier de demande de logement » ? et « Votre logement est-il insalubre ? » ou bien « Êtes-vous suivi par les services sociaux ? »
Naïvement, je demande à l’accueil du centre administratif s’il existe quelqu’un pouvant assurer la traduction : bien sûr que non !
Alors, j’explique à M. K. que c’est trop compliqué dans ces conditions et qu’il doit revenir avec un traducteur. Qu’à cela ne tienne ! Il retourne dans la salle d’attente, avise un homme qui patiente et s’adresse à lui en arabe ; l’homme répond et accepte de jouer ce rôle.
Moment toujours délicat où je m’adresse à mon interlocuteur par personne interposée : à qui dois-je parler ? Qui dois-je regarder ?
Je remarque que même ce monsieur, dont l’arabe est pourtant la langue maternelle, ne connaît, pas plus que moi en anglais, les mots pour dire « assistante sociale » ou « dossier ». Il les dit sans hésitation en français, noyés dans le reste en arabe.
Eh bien, nous y sommes arrivés, enfin, surtout moi !
Je conseille fermement à M. K. de toujours venir accompagné d’un traducteur.